"A Guy-Valvor. NOUS La chanterons, au jour le jour, la vie errante, La joie exquisement amère des départs, Les horizons changeants et l’ardeur enivrante De fuir vers l’Inconnu au seul gré du hasard ;Nous chanterons les ports, qu’illumine la gloire Des ciels couchants rayés par la forèt des mâts, Les villes s’effaçant au lointain, vains amas De foyers clignotants piqués dans la nuit noire ;La solitude au sein de l’Infini mouvant Des mers, quand, sous la lune argentant le sillage, On entend seulement passer dans les cordages La plainte monotone et berceuse du vent ;Le halètement bref dans les grands halls sonores Des trains prêts à partir, et la solennité Des paquebots, vers qui les mouchoirs agités Prolongent leur suprême adieu longtemps encore ;D’exotiques senteurs les longs quais parfumés Qu’assourdissent les cris d’oiseaux multicolores, Les demeures d’un jour que l’on quitte à l’aurore, Les beaux yeux entrevus qu’on eut peut-être aimésLes Villes de l’Asie aux blancheurs de colombes, Vers le ciel bleu dardant leurs sveltes minarets, Et sur le flanc des monts, à l’ombre des cyprès, Pèle-mêle semant leurs maisons et leurs tombes ;Les cités dont l’histoire autrefois proclama La gloire : Argos, Mycène, Ilios et Carthage Que, bravant le respect des morts, l’homme exhuma De leur vivant linceul d’herbe et de fleurs sauvages."